Xiao Long [ : xiao, chouette, contrebandier ;  : long, cavité] se retournait sans arrêt dans son lit sans trouver le sommeil et sans pouvoir contrôler les paroles connues qui circulaient dans sa tête :

Ce jour-là dans la brume odorante du Palais des Sutras, j'entendis la parole vraie dans celles que tu me récites.

Ce mois-là je tournais tous les rouleaux de prière non pas pour sortir de l'abîme de misère, mais seulement pour toucher le bout de tes doigts.

Cette année-là, je me prosternais sur les chemins de montagne et cognais ma tête à terre [pour prier], non pas pour obtenir semonce, mais pour sentir ta chaleur.

Cette vie-là, je retournais monts et eaux et pagodes, non pas pour une meilleure vie prochaine mais pour te rencontrer en chemin.


Ce que les paroles de la chanson montrent n'a rien de beau ou de romantique, mais ce qui est douleur, souffrance et lutte persistante. Ce qui apparaît sous les yeux ne peut être que : Tsangyang Gyatso [Sixième Dalaï-lama] qui avait déjà séjourné au Palais du Potala et qui toutes les nuits, s'échappait secrètement du palais, violant ainsi les règles monastiques, pour plonger dans la vie de l'extérieur. Xiao Long aurait tellement aimé faire comme lui, aller chercher une femme qu'il aime, dans les bras de laquelle il aurait pu tomber. Dans ces moments-là, ce qui lui venait à l'esprit c'était précisément le regard plein de convoitise de Lhazang Khan [Roi d'une tribu mongole qui tua le régent du Tibet alors que Tsangyang Gyatso était jeune] envers Tsangyang Gyatso qui le dénonça à l'Empereur de Chine en disant que « comme il n'observait pas la discipline monacale, il était un faux Dalaï-lama ». À 24 ans il fut kidnappé et tué et ne put prendre la place de Sixième Dalaï-lama comme prévu. Une situation similaire, un conflit similaire : en désirant attirer les femmes, mais ayant peur - après les avoir obtenues - de ne pas pouvoir atteindre la position à laquelle il aurait droit et d'être ainsi exclu de la communauté des hommes. Il passait ses nuits à se retourner, sans dormir. Il avait fait l'expérience d'incalculables luttes et donc en arrivant à l'université il avait pensé que tout irait mieux en un rien de temps. Seulement, il n'avait pas pensé que les conflits étaient fixés en lui-même pour le dévaster comme jamais auparavant. Les conflits étaient comme des eaux inondant et détruisant tout sur leur passage. La belle vie estudiantine imaginée était devenue une entrave irrespirable qui maintenait fermement ses deux jambes comme pour l'empêcher de marcher, sans parler de la force nécessaire à surmonter tout cela.

Après que Tsangyang Gyatso fut choisi secrètement comme la réincarnation du Cinquième Dalaï-lama, celui-là, dès ses deux ans, resta sous la protection du régent Sangye Gyatso, mais conserva une vie du commun des mortels (ses parents sont « normaux »). C'est à l'âge de 15 ans seulement qu'il est reconnu officiellement comme la réincarnation. Il est alors transféré au Palais du Potala. Tout se passait si soudainement, d’autant que le Cinquième Dalaï-lama était bien mort depuis longtemps mais que sa mort n'avait pas encore été annoncée publiquement ; et si Tsangyang Gyatso était déjà un habitant du Palais du Potala, personne ne le prenait pour le Sixième Dalaï-lama. Il n'était encore qu'un enfant. Il parait que son expérience complexe comme réincarnation spirituelle du Cinquième Dalaï-lama l'avait presque empêché de devenir Dalaï-lama. Les personnes qui l’avaient soutenu dans son devenir d'adulte continuaient à le protéger. Tsangyang Gyatso avait l'impression que comme il était jeune, il ne pouvait s'occuper des affaires politiques. Parfois il essayait bien de comprendre ce que son entourage faisait, mais ceux-ci ne jugeaient pas nécessaire d'enseigner ces choses à son âge, bien que son prédécesseur s'occupât au même âge déjà des affaires politiques. Ne trouvant pas d'issue, il n'avait que les sorties nocturnes et l'improvisation poétique. Tsangyang Gyatso avait-il ainsi trouvé la réponse qu'il espérait attendait ?

En ce qui concerne Xiao Long, la mort soudaine de son père constitue presque la division entre l’insouciance de l'enfance et l'entrave de l'adolescence. Il a eu une belle enfance durant laquelle il a été le seul fils et le dernier enfant, son père l'aimant sans pour autant le chouchouter. Son père jouissait d’une très bonne réputation là où ils vivaient. Il était très capable dans les affaires et avait donné à leur foyer confortable et heureux un ciel brillant. De son vivant, leur vie était au-dessus de celle (des contingences) des masses et de la réalité. À l’époque, sa mère - à ses dires - était très distinguée comme à la cour de l'empereur, ce qui le rendait très fier.

Tout se passa très soudainement. Une nuit, le père n'était pas revenu, il ne savait pas ce qui s'était passé mais son corps froid avait été ramené par d'autres. Immédiatement, sa famille fut enveloppée d'un nuage noir. Sa mère endeuillée n'avait plus la force de s'occuper de lui. Les funérailles se passèrent dans une atmosphère silencieuse, triste et solennelle. Étant le seul fils et portant grande importance à la piété filiale, il fit l'expérience de choses dont il n'avait jamais fait l'expérience. Il était très fier de porter les habits de deuil 1[habits non travaillés sans couleur/blancs] ; il en parlait ainsi : comme s’il portait un uniforme pour l'école. Il portait la tête haute et allait et venait dans le village. Il avait même l'impression que les habits de deuil pouvaient attirer l'attention de la fille qu'il préférait. Ses sœurs étaient toutes affligées ; mais lui n'était pas comme elles, il paradait un sourire aux lèvres dans le village. Sa famille était tombée dans l’obscurité, dans tout le village il n'y avait personne qui, comme lui, ne fut aussi léger et souriant. Quand d'autres qu'il rencontrait montrait un air surpris, il en ressentait une sorte de blâme : comment peux-tu encore rire dans de tels moments ? Il sentait bien que c'était inopportun, mais l'enterrement de son grand-père paternel auquel il avait pris part était comme un étaiement de son propre rire [homophone en chinois d’école et de piété].

Un an auparavant son grand-père était mort. L’organisation de l’enterrement pour le grand-père fut un grand événement pour la famille, et aussi un événement joyeux2. Tous se réunirent ; sur chaque visage aucune tristesse mais presque un sourire. Son père avait trois frères et ce furent eux qui portèrent le cercueil dans la montagne, et firent de cet enterrement un succès complet. Son père et ses oncles avaient tous manifesté la piété requise et enterré le grand-père en paix. Sur le chemin de montagne, non sans inquiétude, il demanda à sa mère : étant votre seul fils, comment pourrai-je porter ton cercueil et celui de papa en haut de la montagne ? Cet enterrement pour lui fut une réunion de famille très animée, sans tristesse ni douleur, et les gens furent souriants comme s’il s'agissait d'un grand événement sacré heureux. Ainsi “rire” était “piété” ; le rire qui accompagnait l'enterrement en paix des générations plus âgées c'était la piété.

Mais lors de l'expérience du départ du père, ce fut c'était comme si il n'y était pas. Il se donnait du mal pour rire mais, se faisant, se retrouvait exclu de la sphère de la piété. C'est vrai il était encore un « petit »3 enfant et n'avait pas la capacité de montrer sa piété. C'est pourquoi d'autres personnes avaient emmené son père à sa place, l’avaient porté dans la montagne et avaient remplacé Xiao Long dans les devoirs qu’il devait assumer envers son père. Sur le chemin conduisant son père dans la montagne sa mère lui dit : « d'autres t'ont déjà aidé à en enterrer un, tu n'as plus que moi que tu auras à porter dans la montagne ! »

Quelle similarité de situation ! Comme Tsangyang Gyatso, Xiao Long avait beaucoup d'affaires qu'il devait assumer mais qu'on ne lui laissait pas assumer car il était un petit enfant. Ainsi, avant même qu'il ait pu comprendre que son père était parti pour toujours, il attendait son père, allant jusqu'à prendre les nuages flottant dans le ciel pour son père parti vers l'Ouest, il pensait toujours qu'un jour son père reviendrait. Il attendait toute la journée, il attendait d'une part que son père revienne s'occuper de lui et d'autre part il se débattait au milieu des femmes pour trouver des réponses.

Xiao Long ne pouvait imaginer comment Tsangyang Gyatso avait pu grandir dans un environnement sans femmes mais était du reste fermement accroché aux femmes. Xiao Long était différent, il avait grandi dès le début parmi les femmes et c'était seulement durant l'année précédant la mort de son père que les filles refusèrent absolument de se réunir avec lui ; ce à quoi il avait répondu par des insultes qui furent suivies par une gifle de son père. Alors que sa famille était dans son village si respectable, comment donc son père avait-il pu se permettre d'être si grossier avec son fils ? Ce fut inconcevable pour sa famille. Son père n'avait rien dit, il avait juste demandé à ce qu'il s'excuse. Lorsqu'il était sorti, il ne savait pas ce qu'il avait fait de mal ; ainsi il n'avait pas reconnu son erreur ni ne s'était excusé, il avait seulement fait un tour dehors avant de rentrer. Mais ce coup de son père était inscrit profondément dans sa mémoire et sa haine envers son père devint de plus en plus évidente. Par le biais de son encoprésie, il évitait son père et conservait une relation avec sa mère. Il savait bien, de surcroît, que sa pulsion d'être avec les filles avait une raison. À l’âge de quatre cinq ans environ, il avait été invité par des petits amis à jouer à des jeux sexuels. Avec une autre petite fille ils se touchaient les organes sexuels l'un l'autre. Durant ce jeu, il avait été si excité et heureux qu'il avait pensé que la petite fille dans ce jeu lui offrait un cadeau incomparablement cher, jusqu'à lui donner l'impression de savoir qui il était à ce moment-là. Quelques années plus tard, alors que quelques filles jouaient chez lui et voulaient lui emprunter un jouet, il sortit ce qu'il avait de plus cher pour qu'elles le laissent participer à leur jeu. Il reçut un refus catégorique. Furieux d'avoir été rejeté, il continua de gigoter et dit : cao ya ma ! [encule ta mère !]4

Comment aurait-il pu savoir, qu'en grandissant, il aurait, malgré la rébellion de son corps, à observer des règles bien plus sévères ? C'était comme Tsangyang Gyasto qui avait à se conformer aux règles monacales5, qui lui donnaient une identité mais lui demandaient encore bien plus de discipline. Les règles de bienséance que Xiao Long devaient observer : homme et femme doivent conserver leurs distances selon les rites ; l'idéal vers lequel on tend : être intègre comme Liu Xiahui [tenant une femme dans ses bras une nuit uniquement pour la réchauffer sans aucun échange sexuel]. C'est une tradition chinoise, mais alors pourquoi cette pulsion qui jaillit de son corps et qu’en faire ? Il aurait tellement voulu que son père puisse s'occuper de lui, il aurait tellement voulu que son père puisse le lui dire. Sa mère ne lui avait pas encore donné l'occasion de se transformer qu'elle s'effondra de nouveau sur lui. Dans la famille de Xiao Long, il devint le seul homme, c’est-à-dire qu'imperceptiblement il assuma la charge de toute cette famille. Sa mère se remit à la recherche d'un homme, car selon elle, son fils était encore trop petit. La position de mâle qui originairement devait revenir à Xiao Long était à céder… Pour Tsangyang Gyatso, il en était de même. Comme il était petit, ses droits et devoirs de Dalaï-lama étaient tous assumés par l'intermédiaire du régent Sangye Gyatso.

Il prit le modèle de Tsangyang Gyatso pour aller chercher une réponse auprès des femmes, retourner dans le lit de sa mère et presque toutes les femmes du monde se cristallisaient chez sa mère. Mais sa mère, dans cet instant, alors qu'elle n'avait plus de forces après la perte de son mari, essayait de son mieux de faire ce qu’impliquait sa condition et cherchait le meilleur moyen d’éduquer ses enfants correctement. Ses manques apparurent aux yeux de son fils jusqu'à ce que celui-ci soit obligé de combler ces manques. Les tragédies de la vie n'ont de cesse de se répéter, et Xiao Long cherchait dans l'analyse ce père, le père qu'il avait trouvé étant soudainement reparti. Il y fut forcé jusqu'aux marges de la folie, sous l'emprise d'un sentiment de solitude, de désespoir et de perte de soi. Cette analyste femme qui était aux yeux de Xiao Long incompétente et inutile devint naturellement un fardeau. Cette incompétence qui réapparut dans ce genre de relation entraîna Xiao Long à prononcer sans crier gare les mots interdits par le père : cao ya ma !  [encule ta mère !].

Cette insulte, peut être que chacun l'a déjà dite une fois, mais en même temps elle avait conduit son père à le gronder sévèrement. Pour Xiao Long, ce qu'il n'a jamais compris : comment une parole que tout un chacun a sûrement déjà employée est devenue pour lui un interdit sévère depuis la mort de son père ? Lorsqu'une mère qui a des manques se promène ainsi toute nue devant un adolescent comme Xiao Long, s’il ne se fabrique pas un interdit sévère, alors qu'adviendra-t-il de lui ?

Lorsque Freud découvre l'inconscient, il découvre aussi que chacun dans son développement à une phase de latence. Après l'Œdipe et après avoir reçu la castration, les Hommes entrent dans une période où le sexe n'est pas actif.


Pour devenir Dalaï-lama, il faut se raser les cheveux et se conformer aux règles de la discipline monastique6. Pour cela, Tsangyang Gyatso dut, seulement à quinze ans, suivre les règles pour bonzes novices. Ce qui aurait depuis longtemps dû avoir eu lieu pendant son enfance arriva seulement lors de son adolescence où son corps s'était déjà éveillé. Ces règles de bonze novice ne purent ramener Tsangyang Gyatso vers la période de latence. Lui qui était au printemps de sa vie ne pouvait être arrêté par les règles pour novices. Toutes les nuits, il sortait, sans soucis, pour parcourir des mondes plus colorés. Quelques années plus tard, alors qu'il devait se soumettre aux règles des moines, il refusa. Il aurait même préféré ne pas avoir eu à se soumettre aux règles de novices. La question qu’il avait à résoudre : un homme qui avait quitté sa maison, purifié par les règles bouddhistes, devait être imperméable à cinq skandhas [la forme, les sensations, les perceptions, les formations volitionelles, et la conscience] comment pouvait-il alors diriger terre et eau [son environnement] ?

Pour Xiao Long il n'en est pas de même. Dans son enfance, tout ce qui avait à voir avec la sexualité était interdit. Les jeux sexuels avec les petits amis du même âge ouvrirent une fente dans cet interdit complet. La jouissance du corps ruissela dans cette fente. Il alla jusqu'à inviter une petite fille en lui disant : Ensemble « cao ya ma ! [va te faire enculer] » ! La petite fille acquiesça. Tout cela se fit dans le secret, en aucun cas cela devait être su par les grandes personnes, car c'était interdit. Finalement, un an avant que son père ne le quitte, la tentative de jouer avec la petite fille fut comme découverte par le père, et radicalement interdite. Le blâme sans mot du père se changea en lui en haine envers son père. C'est justement la haine qui déferla en lui qui amena la mort du père. Tout cela empêche Xiao Long de faire face à la perception, la conscience d'un corps qui grandit. Il ne peut que s'emprisonner dans le « petit ». Pour Xiao Long, comment peut-on devenir père si on ne grandit pas pour être homme ?

Dans un rêve, il y a une ville dont les murs sont très hauts. Les murs et la grande porte sont noirs. À côté de la grande porte, une personne habillée en noir se tient debout. Sans bouger, elle garde la porte. Xiao Long marche sur une route très très longue. Il revient à cet endroit, son père n'est toujours pas mort, il l'attend. Depuis le moment où il s'est sauvé, il a su qu'il allait revenir, sinon il allait partir à la dérive pour toujours sans jamais appartenir à un groupe. Comme son père le lui interdit à cause du « cao ya ma ! [encule ta mère] » ! Lorsqu'il fait face à la séduction de la mère, cet interdit du père, il l'utilise sans conditions.

Ainsi il s'emprisonne dans le village d'origine. Jusqu'au jour où il rêve qu'il casse l'appareil photo d'un homme qui prend des photos de Xiao Long en train de faire l'amour. À cause de ce rêve, son premier analyste revient. Son analyste était parti, mais le mécanisme qui s'était établi entre eux deux reprend sa fonction. Les interférences de l'analyste sont contenues dans les associations de Xiao Long. Il n'est plus l'analyste qui l'a laissé tomber et ne s'en occupe pas. C'est justement par cet analyste dans son cœur qu'il déclenche son rêve. Il n'a plus besoin d'attraper un père réel qui lui pose des interdits. Finalement, il accepte vraiment le départ du père, tout comme il accepte le départ du premier analyste.

Est-ce derrière le « va te faire enculer » qu'est enfoui le « encule ta mère » ou bien est-ce derrière le « encule ta mère » que le « va te faire enculer » est enfoui ? Quoi qu'il en soit, Xiao Long s'aperçoit que, durant son enfance, toutes les activités autour de la sexualité sont interdites par les grandes personnes et sont comme les règles de novices auxquelles la réincarnation doit se soumettre. Ne serait-ce pas justement cet interdit sur la sexualité en lui-même qui définirait la sexualisation de chaque individu ? C’est-à-dire que, si un individu n'a pas complètement reçu cet interdit, cela signifie que sa sexualité n'a pas atteint la symbolisation ? Xiao Long ne peut se défaire de son père mais ne peut non plus supporter cette réalité inévitable que son père le quitte. Il s'accroche fermement à son père. Xiao Long se voit interdire toute invitation par une fille, interdire par tout homme que le père représente. Il utilise pour cela une expression qui exprime sa relation avec des femmes de sa génération7.

Dans la langue de Xiao Long, le nom utilisé pour désigner l'organe sexuel féminin est蛊[gu, insecte venimeux légendaire] que les femmes adultes appellent gumama, et les plus jeunes appellent guyaya8. Yaya [pousse, germe] et mama [dialecte, grand-mère paternelle] ouvre l'écart entre femme et fille. De même, le passage de « va te faire enculer » au « encule ta mère » entraîne l'écart entre le père, le beau-père et Xiao Long. L'homme de sa mère devient ainsi dans sa bouche un beau-père, un homme affable et respectable ; un homme d'expérience et responsable. Il a du mal à sortir de son « petit » pour entrer dans son « école » qui lui est compatible.

C’est justement par l’élaboration de l’organe sexuel féminin qu’il trouve la différence entre homme et femme. Dans cette société patriarcale, il trouve une pièce de un kuai qui symbolise un homme. Le secret de sa masculinité est découvert, par le biais du « un » servant de code secret qui le fait déboucher sur un tronc à donations.

Peut-être que Tsangyang Gyatso trouve en s’abandonnant aux femmes justement la clef du secret de sa masculinité. Alors que ses ennemis complotent pour l’accuser à tort et amènent une calamité sur le commun des mortels, il passe pour mort, se sacrifiant pour sauver le peuple. Après sa fausse mort, il partage son temps entre Alxa [en Mongolie intérieure] et Qinghai [province au Nord du Tibet] et devient le Khenpo9 de treize monastères. Xiao Long, bon an mal an, finit dans tout ce processus par terminer ses études universitaires, obtient son diplôme et un travail pas si mauvais. De nouveau, il doit faire face à la séparation d’avec son analyste, pour qui il prépare exprès quelques mots et se ménage une porte de sortie. Au minimum, le travail réel peut aider à supporter la séparation à laquelle il est obligé.


En Chine, depuis des temps immémoriaux, il y a une tradition de « piété filiale envers les morts ». Par le biais de celle-ci, nous opérons une transmission entre les âges, nous marquons la différence entre les générations, et nous obtenons notre identité. au cours de l’enterrement du grand-père de Xiao Long, les fils adultes se succèdent pour porter son cercueil dans la montagne et il est enterré de leurs propres mains. La piété est symbolisée par cette cérémonie : non seulement elle symbolise l’identité du père et des oncles, mais en même temps, elle symbolise la force du père et des oncles, la force d’homme. Mais Xiao Long ne peut faire comme la génération des pères, après le départ de son père, fièrement, il en prend congé par un rire. Cette cérémonie qu’il doit mener à bien, il le fait aussi par l’intermédiaire des autres car il n’a pas la capacité de prendre congé de son père. Il en est empêché et placé hors de la communauté des hommes comme son père. Il ne peut ainsi mener à bien les sacrifices de piété envers son père. Comme son nom l’indique, étant petit et ne pouvant montrer de la piété, il est entravé. Par le murmure des paroles, Xiao Long est ramené à la source des conflits. Finalement il a obtenu la capacité de casser l’emprisonnement, de mener à bien le deuil envers son père, de découvrir le secret de la masculinité pour arriver à la paternité.

Petit, sans pitié


Zhao Min

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Texte présenté à Chengdu lors du colloque franco-chinois

« Masculinité et paternité »

男性与父性

19, 20 et 21 avril 2011


Traduction de Violaine Liebhart


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