Séminaire du 16 juin 2011



« Pourtant le tartare, lui aussi, est parfois flâneur, et peut-être autant qu’un parisien ; mais il flâne d’une autre manière ; il n’a besoin ni de canne ni de lorgnon. Quand il lui vient en tête d’aller voir un peu ce qui se passe par le monde, il décroche son fouet suspendu au-dessus de la porte ; il monte sur un cheval toujours scellé à cet effet, et attaché à un poteau planté à l’entrée de la tente. Alors il s’élance dans le désert, n’importe de quel côté ; s’il aperçoit un cavalier dans le lointain il se dirige vers lui ; s’il voit s’élever la fumée de quelque tente, il y court, et toujours sans autre but que de pouvoir causer un instant avec quelques étrangers.1 »




Alors, continuons de dialoguer,un instant encore, avec un étrange étranger, en espérant qu’il ne s’agira pas d’un dialogue de sourd, encore que le rapport des sourds-muets avec la psychanalyse et ses extensions théoriques serait plutôt marqué du sigle de l’exclusion.

C’est ainsi qu’ils se trouveraient de se tourner vers les Chinois,bien que ni sourds et muets,qui vivent cependant dans une langue qui écrivant des sons, écrit plutôt du signifié que du signifiant se rapprochant ainsi du langage des signes qui est celui des sourds et muets occidentaux.

L’attention portée à l’autre par le regard mérite l’attention des psychanalystes dont la pratique se fonde, malgré les modifications modernes, sur la soustraction de l’autre au regard.


Donc, rejoignons ce Wang Chong, si éloigné dans le temps et dans l’espace, apprenons sa langue :


« Le ciel n’agit pas, ne parle pas et n’intervient pas dans les désastres et les prodiges qui surviennent d’eux-mêmes sous l’effet de flux atmosphériques. La nature est sans intention, elle est aussi sans intelligence. »

« Doit-on, comme le soutiennent ceux qui débattent de ces questions, attribuer des prodiges tels qu’une vache qui met bas un poulain ou un pêcher qui produit des prunes, à l’action d’une divinité céleste qui se serait introduite dans le ventre d’un animal ou qui aurait miraculeusement transposé des fruits d’un arbre à un autre ?2»


夫天無為,故不言。災變時至,氣自為之。 夫天地不能為,亦不能知也 。腹中有寒,腹中疾痛, 人不能知也, 氣自為之。

牛生馬,桃生季,如論者之言,天神人牛腹中為馬,把季提桃問?


Une dernière allusion à Wang Chong, pour terminer l’année, par un retour à son début :

« L’union des souffles du ciel et de la terre engendre tout ce qui existe aussi naturellement qu’un époux et son épouse, en s’accouplant, conçoivent un enfant. »


天地合氣,萬物自生,猶夫婦合氣,子自生矣。


1 Regis-Evariste HUC, 1846. Souvenirs d’un voyage en tartatie et le Tibet, tome I. Domaine Peuples du Monde Astrolabe.1987. p.102.


2 Wang Chong, Balance de discours, Les belles-lettres. p. 111.


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Séminaire de Michel Guibal

2010 - 2011


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