En son organisation conviviale et rigoureuse, le séminaire d’Emeishan a ouvert de multiples espaces, permis de fructueux échanges. Chacun en est parti reboussolé… La rencontre avec le Groupe de Chengdu aura été un enseignement, pour un analyste français. Parce qu’il aura permis de reconsidérer ce que peut être une psychanalyse lacanienne… Les analystes chinois ont, du fait de leurs divers enseignements, appris à lire l’inconscient, loin de la psychologie et de la psychiatrie. C’est incontestablement une approche féconde, si l’on considère que l’inconscient freudien, renommé par Lacan en l’une-bévue, est ce qui, dans ce qui s’entend, se donne à lire… Reste que la psychanalyse, en son développement comme en son histoire, s’est construite sur une expérience clinique, à la culture arc-en-ciel puisqu’elle implique Freud, Klein, Winnicott, Bion, Dolto, Pankow, Mannoni et bien d’autres encore : il résulte de cet héritage éloigné d’un camaïeu une tradition clinique préoccupée autant de celui qui parle que de ce qui s’y fait entendre, d’une certaine façon, dans un rapport étrange et difficile au fait de dire… Cette dimension de l’énonciation, aussi importante que celle de l’énoncé, est peu envisagée encore dans l’expérience de la psychanalyse en Chine. Rome ne s’est pas faite en un seul jour…

Mais cette référence à Rome donne au discours qui en 1953 s’y tint, une actualité souvent considérée comme hors de mise, cinquante ans plus tard en France. Et c’est peut-être d’autres racines de la psychanalyse lacanienne qui soudain apparaissent en contrepoint des échanges avec les collègues chinois. Le surréalisme, disait O. Paz, « c’était la pomme de feu dans l’arbre de la syntaxe » Il en va de même de la psychanalyse, en tant qu’elle est un dire qui est autant de rupture que de création. Il sera intéressant de savoir comment, y compris par rapport à la tradition lettrée, la psychanalyse chinoise trouvera, à sa façon, les ailes pour se dire autrement.